Le Maître – Claire North

La Maison des Jeux, tome 3

Le Bélial – UHL

Le Maître vient clôturer la trilogie de La Maison des Jeux de Claire North. Clôturer est un terme bien faible pour retranscrire la fin de cette aventure, tant nous avons vécu, vibré au cours de ces trois novellas. Ce sont des sensations proches du joueur invétéré qui joue gros, qui joue tout, qui joue au-delà de la raison sur un ultime coup, un lancer de dés, le tirage d’une dernière carte, une mise indécente au blackjack ou encore le « All-In » au poker. Des sensations étranges et complexes, composées, d’espoir, d’addiction, d’adrénaline, de calculs, de pétillance et de tripes liquéfiées.

Nous avions débuté ce périple, il y a quelques siècles, en compagnie de Théne, une jeune femme trouvant un épanouissement intellectuel dans le jeux, à défaut de le trouver auprès de son époux. Initialement, il s’agissait de cartes, des échecs, et, peu à peu ses facultés sautèrent aux yeux, attirant le regard des décideurs, en perpétuelle recherche de joueurs habiles tout autant qu’adéquats. Ainsi, Thène fait-elle son entrée dans la Haute Loge, les enjeux y sont plus couteux et plus extravagants.

En sus de nous introduire cette curieuse entité qu’est La Maison des Jeux, une corporation perpétuelle et secrète qui choisit ses membres parmi les Joueurs, elle nous présente un personnage attachant et esquisse les contours d’une future confrontation. Cette entrée en matière présentait déjà de grandes qualités, un style remarqué et remarquable, un rythme élevé, de la tension dès les premières pages, un mystère captivant, l’ensemble étant vraiment addictif. Nous y faisions également la rencontre d’un personnage énigmatique, Argent.

Lors du tome suivant Le Serpent, Claire North nous conviait à une partie de cache-cache qui dévoilait des aspects originels de la Maison des Jeux, tout en suivant un Remy Burke aux prises avec un pari insensé. La course-poursuite réussissait à nous bluffer tout autant que le premier tome alors que la novella ne pouvait jouer sur l’effet de surprise! Argent y faisait quelques apparitions savoureuses, provocant une envie furieuse d’assister à une partie de ce joueur d’envergure, et nulle autre que celle du All-in! La nature même de la Maison nous échappait, toutefois, nous en devinions quelques contours et motivations.

Puis vint Le Maître.

Comment Claire North réussit-elle à nous émerveiller alors qu’elle a clairement (désolée, c’était trop tentant 😉 ) annoncé la trame de cette dernière partie ( 😉 ) ?

Le récit était attendu, les protagonistes tout autant.

En effet, les deux premiers tomes sont uniques et indépendants l’un de l’autre, très réussis individuellement, néanmoins, ils ne s’avèrent que les préludes au Grand Jeu, à ce Maître.

J’aurais été déçue de ne pas y trouver Argent, tout autant que je l’aurais été s’il ne s’y décidait pas à affronter la Maîtresse de la Maison des Jeux. Le contexte des deux premiers tomes nous y programment, en dévoilant peu à peu les facettes uniques de cette entité, tout aussi envoutantes et addictives que périlleuses (Mais après tout que procurerait le jeu, s’il n’existait pas un défi à relever, un danger à se jouer ? ). Le mystère et l’aura de puissance de la Dame Blanche participent pleinement à l’attrait que nous éprouvons pour cette opposition. Nos cœurs ont déjà basculé en faveur d’Argent, grâce à ses précédentes interventions. Il est David affrontant Goliath, car Claire North a glissé habilement lors de quelques passages que cette dernière était une joueuse redoutable, et qu’elle n’hésitait pas à « travailler » les probabilités.

Attitude d’autant plus logique que le plateau concerne le Globe tout entier, que le destin de nations et d’empires s’y joue… sans compassion, sans scrupule. A quelle fins ?

Et, Claire North ne nous dira pas tout. Nous ne connaîtrons pas toute l’histoire de cette Maison des Jeux, toutefois, elle nous donne davantage, et dans ce pari littéraire que nous avons décidé d’engager, nous en sommes les gagnants (pas vainqueur, hein), avec la sensation d’avoir traverser des péripéties échevelées, survécu à des paris insensés, participer à des parties relevées et découvert le Grand Jeu. Le ton est assez dur, sans complaisance pour les joueurs et pour l’ensemble des pions, interchangeables quelque soit leur position, marionnettes sans guère de moelle épinière. Ce parti pris peut surprendre, et paraître même cynique… comme le monde, mais il reste si adapté.

Le Maître, conclusion de la trilogie, La Maison des Jeux, porte magistralement son titre. Ces trois romans nous transportent dans un monde parallèle, où le temps s’écoule au rythme d’un sablier dont chaque graine résonne de manière unique, sensation d’un battement de ceour pris dans les vertiges du jeu. Un jeu dont les dés sont pipés, l’échiquier notre monde, les pions – à l’image de la vie – nous tous dans une vaste comédie aux enjeux au-delà de toute attente, car c’est le concept primordial qui s’y joue, l’ humanité. Prenant, saisissant, ce dernier volet nous transporte avec une fièvre certaine, pour nous jeter lors de la chute sur une rive inattendue, les yeux brillants, le souffle retenu depuis bien trop longtemps, le palpitant en émoi,…

Les autres tomes :

1- Le Serpent

2- Le Voleur

3- Le Maître

Ce livre est pour vous si :

  • vous aimez les formats courts
  • vous recherchez une intrigue haletante
  • Une immersion réussie

Je vous le déconseille si :

  • Le 4° mur brisé provoque un véto de principe
  • vous n’aimez pas qu’un roman navigue entre les genres
  • Vous préférez colin-maillard

Autres critiques :

Mon TrollNavigant dans une autre Constellation, Orion

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Le Maître de Claire North

Encore une réussite aussi pour Aurélien Police dont la couverture reflète à merveille le roman, et chapeau à Michel Pagel pour la qualité de la traduction que l’on ne voit pas.

10 réflexions sur “Le Maître – Claire North

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